vendredi 4 avril 2014

Un exemple du dialogue avec le gouvernement vénécubain : séance à la Cour inter-américaine des droits de l'homme du vendredi 28 mars 2014 sur la situation des personnes privées de liberté

Il relève de l'intervention du représentant du régime véné-cubain que le script des 40 années de bipartisme ne suffirait plus à expliquer les griefs dûment soulevés contre les mauvaises politiques de la révolution bolivarienne. De même qu'à la suite des dernières élections présidentielles le régime s'est donné à la tâche de parler désormais d' "un siècle d'erreurs".


J'ai malheureusement le sentiment qu'il est arrivé au Vénézuéliens la même chose qu'au petit garçon qui criait au loup. Certes, d'un point de vue formel, le projet de la révolution bolivarienne est irréprochable mais il suffit de comptabiliser le nombre de manifestations toujours croissantes contre le régime depuis la fermeture de la concession de la chaîne privée RCTV pour constater qu'au Venezuela la démocratie n'est autre chose qu'un mythe (cf.  http://caracaschronicles.com/2014/02/25/busting-the-myth-of-democracy-in-venezuela/). Les DDHH continuent à être écrasés à la vue de tous et, alors que tout le monde sait que c'est l'Etat qui détient le monopole de la force et à qui il appartient de veiller à la sauvegarde de ses citoyens, les nombreuses images qui arrivent via les réseaux sociaux continuent à dessiner un paysage où des convois de guerre sont envoyés pour réprimer les barricades des civils. La question que beaucoup de Vénézuéliens continuons à nous poser c'est pourquoi ne pas investir autant de moyens dans les domaines où les besoins sont criant, à savoir : santé, alimentation et sécurité. D'un côté les ONG de défense des DDHH et les gouvernements démocratiques du monde exhortent le gouvernement au dialogue et à veiller au respect des garanties fondamentales des citoyens ; et, d'un autre côté les Vénézuéliens qui pensent différemment et qui sont attachés à une identité culturelle qui leur est propre sont harcelés morale et psychologiquement par des menaces, des phrases qui cherchent l'intimidation, tandis que ceux qui ont le courage de défendre leurs droits dans la rue sont tout simplement massacrés. Le terrorisme d'Etat bat de plein fouet et le soutien international est décevant. Ainsi, dans les derniers communiqués des ONG comme Amnesty International la marge d'action laissé au régime véné-cubain pour qu'il puisse encore défendre la thèse d'un coup d'état "fasciste" est assez large .


Un espace de dialogue, dans toute démocratie saine, comme devrait être l'Assemblée nationale, s'est transformée en un tribunal de l'inquisition où des députés élus par le peuple sont déchus de leur poste pour la seule raison de contrarier les caprices d'un régime qui a fait ses preuves. Il suffit de rappeler le cas de Richard Mardo et le plus récent de Maria Corina Machado, insultés, hués, traités de fascistes et des criminels. Ce sont là des conditions propices au dialogue???
Les Vénézuéliens en ont ras le bol ! Comment expliquer sinon leur présence massive dans les rues malgré la répression brutale des gardes nationaux et les menaces et agressions des chemises noires de la révolution bolivarienne ??? 

Il convient également de rappeler combien le Venezuela a été pionnier en matière des lois relatives aux réformes sociales et à la gestion des ressources naturelles ; pour ne citer que les plus importantes :
En matière d'éducation:
- le décret sur l'instruction publique, gratuite et obligatoire de Guzmán Blanco, du 27 juin 1870
- analphabétisme zéro et réforme de l'éducation supérieure en 1939
- programme des bourses d'État FUNDAYACUCHO en 1974
Réforme agraire et gestion des ressources naturelles:
- loi d'hydrocarbures de 1943
- loi organique sur l'environnement de 1976
- nationalisation de l'industrie du fer en 1974 et de l'industrie pétrolière en 1976
En matière sociale:
- création de l'Institut vénézuélien de la sécurité sociale en 1946 et de la loi organique du travail;
- puis, à partir de la consécration de tout un chapitre de droits sociaux dans la Constitution de 1961 (articles 72 au 94), le pouvoir législatif promulgue toute une série de lois relatives aux accidents du travail, assistance sociale et prestations.

Beaucoup des fervents défenseurs de la révolution bolivarienne soutiendront qu'il ne s'agit là que de lettres mortes.  Néanmoins, on ne peut effacer un siècle d'histoire républicaine et d'évolution législative en 15 ans. S'il est vrai qu'à la fin des années 1980 certaines structures de l'état étaient défaillantes la solution -encore une fois et comme je l'ai remarqué à maintes reprises dans d'autres commentaires et comme beaucoup de Vénézuéliens le savent bien-, ne se résumait pas à la création des structures parallèles de qualité médiocre et à vocation clientéliste. Ce genre des politiques n'ont fait que reproduire et à aggraver les tares de notre histoire politique. Un régime cohérent et qui se veut démocratique aurait su profité de l'actif de l'héritage que ses prédécesseurs ont laissé pour l'amélioration des structures existantes. Quelle meilleure preuve de rupture de l'état de droit que la prétention d'effacer les progrès législatifs acquis dans le passé ?

Au cours de l'évaluation du point relatif aux personnes privées de liberté au Venezuela, le représentant du régime véné-cubain décrit l'administration des prisons de manière peu ajustée à la réalité. À l'entendre on aurait l'impression de retrouver des programmes semblables à ceux des clubs med. Au cours des dernières années de nombreuses manifestations ont eu lieu au sein des prisons, mais le régime s'est livré à répandre sa propagande politique comme c'est son habitude. D'autres irrégularités telles que l'existence de boîtes de nuit dans la prison de Tocoron, des cas de discrimination, de traffic d'armes ou les grèves de la faim assumées par certains prisonniers s'ajoutent aux griefs indiqués par le dénonçant auprès de la Cour Interamericana de DDHH (cf. http://www.reportero24.com/2014/01/tocoron-remodelacion-de-disco-tokio-enciende-polemica/). Ce qui me surprend le plus c'est l'argumentaire si faible et appauvri du représentant de l'Etat qui, dans un effort pour détourner l'attention et d'éviter de répondre aux plaintes déposées termine par justifier l'obligation pour les reclus de porter un uniforme en citant l'exemple des prisons américaines. Contradiction flagrante qui n'a rien de nouveau pour les Vénézuéliens informés. Je vous invite à découvrir par vous mêmes cette séance et à juger de la qualité des arguments mais surtout de la maîtrise employée dans leur exposé.  Tandis que le représentant des plaignants semble imprégné du sujet le représentant de l'Etat se contente d'employer un ton intimidant et de lire des phrases sélectionnées au hasard sur un document écrit...

Cette référence à une 4ème république tirée peut-être d'un livre d'histoire politique française mais, dans tous les cas déconnecté de l'histoire républicaine vénézuélienne car, je le répète, suivant notre histoire constitutionnelle nous en serions à la 14ème république... voilà l'aberration !

À l'image de tout l'argumentaire véné-cubain, l'on termine par révéler les contradictions du discours révolutionnaire dès lors que les comparaisons avec le modèle "impérialiste" sont nombreuses... Comme d'habitude...

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